Article de la BU Lyon 1 pour le 8 mars : Les Femmes dans les sciences

par Emma Goepfer

Les Femmes dans les sciences

Ce n’est qu’à la fin du XIXème siècle que « les femmes ont conquis le droit de suivre des cours à l’université », et par la suite d’enseigner. C’est d’ailleurs en 1863, à l’Université de Lyon, que la première femme a eu le droit de s’inscrire ! Marie Curie fut la première en France à obtenir un doctorat de Sciences Physiques. Plusieurs femmes scientifiques ont dû user de stratagèmes pour s’intégrer dans le monde des sciences et de la recherche, et même si la situation a évolué, « la participation des femmes à la production scientifique reste marginale » aujourd’hui. (1)
 

Et pour cause, comme le démontrent les statistiques du Ministère de la Recherche analysées par Simone Gilgenkrantz dans son article sur la place des femmes dans la recherche (2) :

  • Les femmes sont minoritaires dans les effectifs de la recherche en Europe
  • La proportion de chercheuses varie selon la discipline scientifique et le pays
  • À partir de la première année, la proportion d’hommes dans les études universitaires augmente progressivement, alors que celle des femmes suit le chemin inverse
  • Le « plafond de verre »(3) est particulièrement présent dans l’enseignement supérieur et la recherche : certains niveaux ne sont accessibles qu’à une catégorie de personnes.

[Encore plus de chiffres sur les femmes dans la recherche sur le lien suivant : https://www-cairn-info.docelec.univ-lyon1.fr/revue-marche-et-organisations-2007-3-page-61.htm ]

En 2020, le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances a publié les « Chiffres clés de l’égalité » (4). Ces données montrent qu’il existe encore bel et bien un écart entre les hommes et les femmes et les idées qui peuvent être véhiculées autour des différentes orientations.

Aujourd’hui, dans la recherche française, les universités œuvrent en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes mais aussi contre tous types de discriminations au sein de l’Université. C’est le cas à Lyon 1 où la Mission égalité devenue Mission Egalité-Diversité en 2016 milite en ce sens. En effet, même si l’écart semble être moins net qu’avant, des différences persistent.

A la Bibliothèque Universitaire Education Lyon Croix-Rousse, un fonds documentaire de recherche interdisciplinaire sur les questions de genre a été créé. Il couvre tous les domaines de la connaissance par l’approche du genre, avec des axes forts : l’éducation, la sociologie, l’histoire, la psychologie, les sexualités…

Il s’agit du fonds Aspasie, nom choisi en hommage à cette femme emblématique de la Grèce antique et compagne de Périclès. Née en Asie et étrangère à Athènes, cette femme libre, savante et intellectuelle, enseigna également la rhétorique à Socrate. (5).

Ce fonds documentaire permet donc, entre autre, de sensibiliser les futurs enseignants aux questions de genre. Vous pourrez trouver sur la page du fonds Aspasie plusieurs bibliographies, notamment une sur les Femmes et les Sciences. Vous trouverez également plusieurs revues imprimées et en ligne (Cahiers du genre, Clio, Gender and Education …), des albums, DVD, ouvrages imprimés…

La lutte contre tous types de discriminations fait donc partie à part entière des missions du Ministère de l’Enseignement Supérieur. Les avancées sont nombreuses, comme la dernière en date du 23 février 2021 : Frédérique Vidal, Ministre de l’Enseignement Supérieur, a annoncé qu’à la rentrée de septembre 2021, les protections hygiéniques féminines seraient gratuites et en libre-service au sein des campus (6) (Article disponible dans la Revue Le Monde, à Quartier Libre à la BU Sciences). Mais malgré cela, il y a encore beaucoup à faire car les inégalités subsistent.

Une étudiante en Master Sciences de l’ingénieurs à Lyon 1 témoigne :

« Globalement, ma formation s’est très bien passée et je n’ai pas trop ressenti de différences de traitement par rapport aux étudiants masculins.

J’ai l’impression par contre qu’il y avait globalement un sentiment de manque de légitimité chez les étudiantes ingénieures qui s’est traduit chez moi par un manque de confiance. À l’école d’ingénieure que je fréquentais auparavant, il y avait une rumeur comme quoi les filles bénéficieraient de discriminations positives à l’admission. Cette rumeur a toujours été démentie par l’administration, pour autant c’est difficile de ne pas y croire alors que l’une des premières choses qu’annonce le directeur lors de la rentrée en première année c’est le pourcentage de fille. Donc, quand je loupais un partiel, j’avais toujours cette réflexion qui me venait : « en fait je suis entrée à cette école parce que je suis une fille, mais je n’ai pas les capacités d’être là ».

Par ailleurs, j’ai senti, pendant mes années dans l’école d’ingénieure, que pour certains profs plutôt âgés, faire cours à « autant de filles » n’était pas dans leur norme. Certains essayaient de faire des exemples « adaptés pour les filles » comme parler de moteurs de robots cuisiniers en précisant que c’est pour les filles de la promo. En général, on sentait que ça partait d’un sentiment, d’une envie de « nous intégrer », mais c’était vexant.

Autour de moi, le fait que je sois ingénieure paraît relativement normal. Je n’ai pas l’impression qu’il y a des idées particulières qui soient véhiculées.

Par contre, j’ai fait mon stage de fin d’études sur un chantier et là j’ai bien senti que j’étais moins à ma place qu’un homme. Mes amis et mon entourage se moquaient gentiment de moi en m’imaginant en tenue de chantier ou travaillant physiquement. Mes amis garçons qui ont fait le même genre de stage n’ont pas eu le droit à ces remarques. De plus, une fois sur place, je me suis rendu compte que le milieu était très sexiste au niveau de l’humour, mais surtout par rapport à la considération portée à leurs collègues femmes. Je suis arrivée en même temps qu’une autre stagiaire, dans une équipe où il n’y avait pas eu de femmes avant, j’ai été super bien accueillie (hormis le surnom « p’tit cul »), mais on nous a très vite considérées comme les petites stagiaires filles qui ont besoin d’être secourues dans ce monde d’hommes. Certains de nos collègues nous aidaient énormément et accouraient dès que nous leur demandions un service. On a donc eu le droit à des réflexions, de la part des anciens stagiaires qui travaillaient encore dans l’équipe, comme quoi c’était beaucoup plus facile pour nous et qu’on n’avait aucun mérite. De plus, mon tuteur a eu beaucoup de mal à me confier des missions et très vite je suis devenue sa secrétaire et non sa stagiaire (et je ne crois pas que ça soit passé ainsi avec ces précédents stagiaires). Je ne me suis donc pas trop sentie à ma place durant cette expérience.

Pour l’insertion professionnelle, j’ai l’impression d’avoir moins de chances qu’un homme, et j’ai l’impression de devoir être plus attentive à mes propos lors d’entretiens d’embauche ou même une fois que je serais dans l’entreprise. Il faut rester discrète sur sa vie privée sinon j’ai l’impression que l’on ne me permettra pas forcément d’évoluer comme je le mériterais. On nous prépare d’ailleurs beaucoup à cette idée lors des cours d’insertion professionnelle

Comme schématisé ci-dessous, seules 1.6% des filles en première générale suivent un enseignement en sciences de l’ingénieur, contre 11,1% des garçons. Les femmes représentent ensuite seulement 28.1% des diplômés d’écoles d’ingénieur (4).

Marie-Hélène Therre, Ingénieur diplômée ENSAIS-INSA Strasbourg et présidente d’honneur de l’association Femmes Ingénieurs, a animé un webinaire organisé par les Techniques de l’Ingénieur [https://www-techniques-ingenieur-fr.docelec.univ-lyon1.fr] sur  la place des femmes dans l’ingénierie (7).

[Retrouvez la totalité du webinaire sur le lien suivant : https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/conferences-en-ligne/ingenierie-les-femmes-prennent-leur-place/ ]

Au programme, plusieurs chiffres qui situent les femmes dans la science, ainsi que les différentes filières plébiscitées par les femmes aujourd’hui. Marie-Hélène Therre explique aussi pourquoi la mixité des équipes est importante, et elle donne quelques recommandations pour piloter son parcours.

D’après l’Observatoire de l’Association des Femmes Ingénieures (8), la proportion de femmes ingénieures augmente d’année en année, sans dépasser toutefois les 30%. Parmi elles, un tiers travaille dans l’industrie et un tiers dans le secteur tertiaire. (8)

Observatoire des femmes Ingénieures- Chiffres clefs, 2019

Marie-Hélène Therre, dans le webinaire, nous dit que les entreprises veulent inclure plus d’ingénieures. Elle cite Chiara Corazza, Directrice Générale du Women’s Forum for the Economy & SocietY :  « Se priver d’ingénieures est un manque à gagner énorme en termes d’innovation, de créativité, de croissance et d’attractivité, (…) elles peuvent contribuer en termes économique, social, de compétences, de talents.» (9)

Plusieurs points sont énoncés pour expliquer que la mixité homme-femme est primordiale au travail : elle « apporte la qualité de vie, elle apporte d’autres regards dans les situations professionnelles et cela permet de développer une analyse plus fine des marchés, des attentes et des besoins des utilisateurs ».

A la fin du webinaire, plusieurs conseils sont prodigués du point de vue des étudiants mais également des professionnels.

Alors Mesdames, croyez-y, et qui sait, vous serez peut-être la première femme à marcher sur Mars ?

Retrouvez les ressources en texte intégral sur Sherlock ou directement à la BU Sciences ou à la BU Education Lyon Croix-Rousse !

Bibliographie :

  1. Boutillier S, Laperche B. La place des femmes dans la recherche : apprentissage, production et valorisation des connaissances. Marche Organ. 2007;N° 5(3):61‑77.

En texte intégral sur Cairn

  1. Gilgenkrantz S. Les femmes dans la recherche française. médecine/sciences. 1 déc 2002;18(12):1287‑91.

En texte intégral sur Istex

  1. Association de formation, d’études et de recherches en sciences humaines (Auxerre), éditeur. Sciences humaines. Vol. 195. Auxerre: Sciences humaines; 2008. *

Dans les BU en version papier :

BU Santé Rockefeller – Cote : 315.040

BU Santé Lyon Sud – Cote : 139.156

BU Sciences – Cote : WP/69

BU Education Bourg-en Bresse

BU Education Saint Etienne

BU Education Lyon Croix-Rousse*

IUT Doua – Cote : 300 SCI

  1. Vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes – Chiffres-clés – Édition 2020 [Internet]. Ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances. [cité 23 févr 2021]. Disponible sur: https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/publications/droits-des-femmes/egalite-entre-les-femmes-et-les-hommes/vers-legalite-reelle-entre-les-femmes-et-les-hommes-chiffres-cles-edition-2020/
  2. Loraux N. Aspasie, l’étrangère, l’intellectuelle. Clio Femmes Genre Hist. 1 avr 2001;(13):17‑42.

En texte intégral Open Edition

  1. A l’université, des protections hygiéniques bientôt gratuites. Le Monde.fr [Internet]. 23 févr 2021 [cité 24 févr 2021]; Disponible sur: https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/02/23/precarite-menstruelle-le-gouvernement-prend-enfin-ses-responsabilites_6070972_3224.html

Dans les BU en version papier :

BU Santé – Cote : 315.011

BU Sciences – Cote : ORP 205

BU Santé Lyon Sud – Cote : 139.088

IUT Doua – Cote : 050 MON

  1. Ingénierie : les femmes prennent leur place [Internet]. Techniques de l’Ingénieur. [cité 23 févr 2021]. Disponible sur: https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/conferences-en-ligne/ingenierie-les-femmes-prennent-leur-place/
  2. Ingénieurs A des F. Les publications – Association des Femmes Ingénieurs [Internet]. [cité 23 févr 2021]. Disponible sur: https://www.femmes-ingenieurs.org/82_p_44328/publications.html
  3. Syntec Ingénierie. Le sens des idées [Internet]. [cité 23 févr 2020]. Disponible sur: https://www.syntec-ingenierie.fr/podcasts/