Portrait : Fanny Richard-Molard, référente Handicap

Point de vue de Fanny Richard-Molard, sur le handicap au travail

Pouvez-vous vous présenter et nous présenter votre rôle à Lyon 1 ? Arrivée en octobre 2015, je suis la nouvelle référente handicap des personnels de Lyon 1. Mon poste est en partie consacré à cette fonction, ce qui n’était pas le cas de la personne qui me précédait. Je viens de Bordeaux où j’ai exercé des fonctions au sein du Ministère de la justice, à la direction interrégionale de la Protection Judiciaire de la Jeunesse du Sud-Ouest, et où j’ai déjà pu porter la casquette de référente handicap des personnels.

A Lyon 1, nous travaillons en équipe pluridisciplinaire sur le handicap, ce qui nécessite d’associer les expertises des services médical et social des personnels, ainsi que des gestionnaires dédiés au niveau des étudiants d’un côté et des personnels de l’autre qui sont regroupés sous la dénomination « Mission handicap ».

Le rôle du référent handicap des personnels consiste à conduire et coordonner des projets sur le sujet au sein de son établissement, allant de l’élaboration d’un plan d’action à l’égard des personnels à de la gestion administrative et logistique concrète. Il s’agit de se saisir du sujet sur l’ensemble des axes que cela suppose, à savoir le recrutement, l’intégration, l’accompagnement et le maintien dans l’emploi ou encore la mise en place d’actions de sensibilisation et d’information.

Le handicap est un sujet transversal qui touche tout le monde. 24 % de la population active en France est en situation de handicap. Autrement dit, nous sommes tous concernés par ce sujet, tant les responsables de son portage politique, que les chefs de service ou les collègues d’une personne en situation de handicap.

La gestion du handicap au sein des personnels fait partie intégrante des missions dévolues aux ressources humaines puisqu’elle induit la dimension de gestion des personnes. Cependant, mon positionnement est assez spécifique car il induit une totale confidentialité des échanges pour instaurer le climat de confiance indispensable pour accompagner au mieux les agents qui en ont besoin, qu’ils se trouvent en situation de handicap temporaire, permanent ou évolutif. L’objectif sera toujours de réfléchir ensemble à la meilleure manière de concilier les répercussions du handicap avec l’activité professionnelle et ses exigences.

Pensez-vous que les personnes en situation de handicap sont à l’aise avec le fait d’aborder ce sujet au travail ?

Il y a des personnes qui n’ont pas de problème pour en parler, d’autres n’en parlent pas pour diverses raisons. Je peux donner ici des exemples de freins régulièrement évoqués, auxquels des réponses existent :

ü « Je ne sais pas comment faire une demande de Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH) » : le service social des personnels et moi-même sommes là pour vous accompagner dans cette démarche. Je vous invite également à consulter le lien suivant http://www.education.gouv.fr/cid95331/faites-valoir-vos-droits.html .

  • « J’ai peur d’être stigmatisé » : cette peur traduit la nécessité de nous battre pour faire changer le regard que l’on porte tous sur le handicap, que l’on soit valide ou non.
  • « Je ne suis pas handicapé à vie » : le handicap fait l’objet d’une reconnaissance officielle qui doit être régulièrement soumise au renouvellement. Cela signifie qu’un handicap peut dans certains cas être temporaire.
  •  « Je ne veux pas que mes collègues soient informés » : il n’est en effet pas toujours nécessaire d’informer le collectif de travail. Par contre, il est parfois nécessaire de se mettre d’accord sur une information à faire lorsque le handicap peut induire des répercussions difficiles à comprendre pour les autres (ex : fatigabilité liée à une maladie, aménagement du poste perçu comme un privilège et non un droit lié au statut), voir poser la question de la sécurité de chacun (ex : épilepsie).
  •  « J’ai une maladie, pas un handicap » : Oui, mais certaines maladies peuvent être reconnues comme invalidantes, que cela soit temporaire ou non. La reconnaissance de leurs répercussions peut faciliter la vie au quotidien.
  • « Je ne veux pas bénéficier de privilèges » : il ne s’agit pas de privilèges mais de droits ouverts par le statut de travail handicapé dans le cadre de l’égalité des chances. L’employeur a obligation de prendre en compte le handicap et le cas échéant de mettre en œuvre des moyens de compensation afin de permettre le maintien de l’activité dans des conditions de travail adaptées.
  • « Je ne vois pas l’intérêt de faire une demande de Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH) » : ce statut donne accès à de multiples droits. Le plus connu est l’aménagement du poste de travail par le biais d’une étude personnalisée. Il s’agit d’une obligation de l’employeur si le médecin de prévention le préconise. Il existe bien d’autres droits que je ne peux détailler ici, mais j’invite les personnes intéressées à consulter le lien suivant pour en avoir une présentation plus exhaustive : http://www.education.gouv.fr/cid95330/le-handicap-vos-droits.html

L’employeur ne prend pas en charge le handicap, mais il le prend en compte. Quand on considère le handicap en le milieu professionnel, on considère avant tout un individu qui détient des compétences dans le but d’exercer des fonctions.

 Quel est votre vision personnelle sur le handicap au travail ?

Je pense que, moins on a de connaissances, plus on a d’idées reçues. Le mot « handicap » est souvent péjoratif et parfois même tabou, car on ne sait pas vraiment toujours de quoi l’on parle et l’on s’appuie à défaut sur des idées reçues.

Certains chiffres peuvent amener à réfléchir, comme le fait que 8 handicaps sur 10 sont invisibles. Pourtant, l’image que l’on aura spontanément du handicap est encore souvent celle d’un individu en fauteuil roulant. Or, d’une part, il s’agit d’une minorité d’individus et d’autre part, cette situation ne sera pas forcément la plus difficile à gérer dans le contexte professionnel qui nous préoccupe.

Prenez le cas d’un agent en fauteuil, qui occupe des fonctions ne nécessitant pas de multiples déplacements et situés dans un bâtiment qui lui est accessible. Prenez ensuite le cas d’un agent malentendant, dont la situation n’est pas connue de ses collègues et de son chef de service, et qui semble désintéressé lors des réunions de travail alors qu’il ne peut simplement pas suivre les échanges correctement.

Laquelle de ces situations sera selon vous la plus difficile à gérer ? Les contraintes liées aux handicaps invisibles peuvent être les plus difficiles à comprendre pour l’entourage, en l’absence de communication et de sensibilisation. Le handicap qui peut paraître le plus « lourd » ne l’est parfois pas si on le replace dans le contexte de travail.

Il existe une grande diversité de manifestations du handicap que l’on retrouve en 5 familles :

  • le handicap moteur, dont seulement 4% nécessitent l’usage d’un fauteuil roulant ;
  • le handicap sensoriel, visuel (cécité ou malvoyance) et auditif (surdité ou malentendance) ;
  • le handicap intellectuel/ mental ;
  • le handicap psychique ;
  • les maladies invalidantes (allergies, diabète, lombalgie, cancer, sclérose en plaques, etc.), qui peuvent entraîner des déficiences et/ou des contraintes momentanées, permanentes ou évolutives (fatigabilité, soins…).

N’oublions pas que le handicap ne doit pas être considéré comme un attribut de la personne et réduit à la déficience, mais comme une situation qui résulte de l’interaction entre la personne et son environnement.

Contact : Fanny Richard-Molard
Politique Handicap de l’Université Claude Bernard Lyon 1